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L’ancien ministre de François Hollande et maire du Mans Stéphane Le Foll est vent debout contre l’union des gauches et notamment du PS avec les Insoumis en vue des législatives.

Vous êtes opposé à une alliance avec La France Insoumise. Ne pensez-vous pas que ce soit le seul moyen pour le PS de s’assurer un groupe à l’Assemblée nationale ?

STÉPHANE LE FOLL. Cet accord est d’abord très important pour La France Insoumise. Sans lui, sa faible implantation locale ne lui permettrait pas d’espérer plus de 50 élus. La dynamique présidentielle qui porte LFI est essentiellement due à la personnalité de Jean-Luc Mélenchon. Mais, à froid, sur des législatives, cette dynamique peine. Ensuite, oui, c’est possible que tactiquement cette alliance soit considérée par Olivier Faure comme une solution pour le parti socialiste, mais à quel prix ? Pour 15 à 20 députés et pour combien de circonscriptions où le PS va devoir s’effacer ? C’est ça l’enjeu, je pense que nous aurions pu garder les circonscriptions de nos sortants sans accord avec LFI. Ce qu’on aurait dû faire, c’est discuter avec les Verts et le parti communiste nos partenaires historiques.

Il y aurait pu avoir un groupe PS sans alliance après le score à la présidentielle ?

C’est vrai qu’après cet échec profond à la présidentielle (1,75 %), la dynamique au plan local est difficile à trouver et certains considèrent par opportunisme qu’il est plus réaliste d’essayer de capter la dynamique de LFI. Mais qu’est-ce que joue Jean-Luc Mélenchon avec cet accord ? Il cherche un leadership d’opposition à Emmanuel Macron. Il a réussi à le faire croire, alors que Marine Le Pen est arrivée seconde, voire, première, dans certaines zones rurales. Ce qui est très habile, aussi, de la part de Jean-Luc Mélenchon, c’est de laisser penser qu’il a atteint ses 22 % sur sa propre ligne. Alors que, c’est sur sa personne, qu’il a suscité un vote utile susceptible, selon lui, de le propulser au second tour. Est-ce pour autant que tous ces électeurs du premier tour sont sur la ligne de la désobéissance européenne, de la retraite à 60 ans avec 40 annuités pour 60 milliards d’euros ? Je ne le crois pas. Une partie d’entre eux est plutôt sur une ligne socialiste responsable.

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Et cette alliance risquerait, selon vous, donc d’être contre-productive ?

Faire des accords au sommet, c’est une chose, mais encore faut-il que ces accords correspondent à l’électorat. Quand le PS se range derrière Jean-Luc Mélenchon sur la base de son programme, c’est que Jean-Luc Mélenchon a gagné et que le PS s’efface. Or, une partie de l’électorat socialiste et écologiste ne le suivra pas sur cette ligne et préférera s’abstenir ou voter Emmanuel Macron. La ligne de Jean-Luc Mélenchon est un leurre qui ne se traduira pas au niveau électoral. Chaque parti sauvera peut-être un groupe à l’Assemblée mais peut-être pas… C’est assez incompréhensible de voir Boris Vallaud, qui a été secrétaire général adjoint de l’Élysée sous François Hollande, négocier un accord qui solde le quinquennat… Moi je ne suis pas fait de ce bois-là. En politique il faut avoir une cohérence, des valeurs et de l’honneur.

Il pourrait y avoir des candidatures socialistes, hors de l’ « Union populaire, écologiste et sociale » ?

Je pense que oui, mais pas uniquement socialistes. En fonction des contreparties demandées, il pourrait y avoir d’autres candidatures qui se maintiennent. Dans la circonscription où j’ai été élu deux fois, la 4e de la Sarthe, c’est un candidat LFI qui pourrait se présenter. Comment voulez-vous que je la cède à LFI ? La députée sortante qui est ma suppléante se représentera.

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Que proposez-vous ?

L’enjeu, c’est la reconquête du vote ouvrier, celui où le RN réalise ses meilleurs scores. Ce vote des « insécurisés » ne se retrouve pas à gauche, Mélenchon compris, mais chez Le Pen. Le 16 juillet, je vais réunir à Arnage en Sarthe, ville socialiste depuis 1966, des intellectuels, des militants et des sympathisants pour imaginer l’avenir de la gauche.

On a beaucoup dit de vous que vous étiez « macron-compatible » …

Moi, je suis fidèle à mes convictions. François Rebsamen (maire de Dijon rallié à la Macronie) m’a demandé plusieurs fois de rejoindre Macron. Je lui ai dit qu’il faisait une erreur. Il ne pourra pas reconstruire la gauche en étant avec Emmanuel Macron.

La direction du PS vous intéresse-t-elle ?

Soit le PS est capable d’accepter un vrai débat soit il continue à se refermer sur lui-même.

Ce qui semble être le cas quand on entend Olivier Faure (le premier secrétaire) dire à ses contradicteurs qu’ils peuvent quitter le parti. Dans cette hypothèse, il faudra voir si on est capable de reconstruire quelque chose de nouveau. Hors du parti.